Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/564

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— Je sais tout, vous le voyez, poursuivait le comte, et je ne suis pas le seul à tout savoir. À cette heure, un mandat d’arrêt est décerné contre vous.

Un cri de rage, sorte de râle sourd, déchira la poitrine de l’avocat. Ses lèvres, que la terreur faisait affaissées et pendantes, se crispèrent. Foudroyé au milieu du triomphe, il se roidissait contre l’épouvante. Il se redressa avec un regard de défi.

M. de Commarin, sans paraître prendre garde à Noël, s’approcha de son bureau et ouvrit un tiroir.

— Mon devoir, dit-il, serait de vous livrer au bourreau qui vous attend. Je veux bien me souvenir que j’ai le malheur d’être votre père. Asseyez-vous : écrivez et signez la confession de votre crime. Vous trouverez ensuite des armes dans ce tiroir. Que Dieu vous pardonne !…

Le vieux gentilhomme fit un mouvement pour sortir, Noël l’arrêta d’un geste, et sortant de sa poche un revolver à quatre coups :

— Vos armes sont inutiles, monsieur, fit-il ; mes précautions, vous le voyez, sont prises ; on ne m’aura pas vivant. Seulement…

— Seulement ? interrogea durement le comte.

— Je dois vous déclarer, monsieur, reprit froidement l’avocat, que je ne veux pas me tuer…, au moins en ce moment.

— Ah ! s’écria M. de Commarin d’un ton de dégoût, il est lâche !