Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/59

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bonne leçon pour Philippe ; ça lui apprendra ce qu’il en coûte pour rendre service aux bourgeois.

— Assez ! interrompit sévèrement M. Domini. Connaissez-vous Guespin ?

Ce nom éteignit brusquement la verve narquoise de La Ripaille ; ses petits yeux gris exprimèrent une singulière inquiétude.

— Certainement, répondit-il d’un ton très-embarrassé, nous avons d’aucunes fois fait une partie de cartes, vous comprenez, en sirotant un gloria.

L’inquiétude du bonhomme frappa beaucoup les quatre auditeurs. Le père Plantat particulièrement laissa voir une surprise profonde.

Le vieux maraudeur était bien trop fin pour ne pas s’apercevoir de l’effet produit.

— Ma foi ! tant pis ! exclama-t-il, je vais tout vous dire, chacun pour soi ; n’est-ce pas ? si Guespin a fait le coup, ce n’est pas ça qui le rendra plus noir, et moi je n’en serai pas bien plus mal vu. Je connais ce garçon parce qu’il m’a donné à vendre des fraises et des raisins de la serre du comte, je suppose qu’il les volait, et ce n’est peut-être pas très-bien, nous partagions l’argent que j’en retirais.

Le père Plantat ne put retenir un : « Ah ! » de satisfaction qui devait vouloir dire : « À la bonne heure ! je savais bien ! »

Lorsqu’il avait dit qu’on le mettrait en prison, La Ripaille ne s’était pas trompé. Le juge d’instruction maintint son arrestation.

C’était au tour de Philippe.

Le pauvre garçon était dans un état à faire pitié : il pleurait à chaudes larmes.

— M’accuser d’un si grand crime, moi ! répétait-il.

Interrogé, il dit purement et simplement la vérité, s’excusant toutefois d’avoir osé pénétrer dans le parc en franchissant le fossé.

Lorsqu’on lui demanda à quelle heure son père était rentré, il répondit qu’il n’en savait rien ; il s’était couché