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sible ; il était affaissé sur sa chaise et ses bras pendaient inertes le long de son corps.

Le banquier, au contraire, se tenait debout, rouge, animé, l’œil étincelant, s’exprimant avec une violence extraordinaire.

— Et l’importance de la soustraction est énorme, poursuivait M. Fauvel ; on m’a pris une fortune, 350,000 fr. ! Ce vol pouvait avoir pour moi des suites désastreuses. Il est tel moment où, faute de cette somme, le crédit de la plus riche maison peut être compromis.

— Je le crois, en effet, le jour d’une échéance…

— Eh bien ! monsieur, j’avais précisément pour aujourd’hui un remboursement considérable.

— Ah ! vraiment !…

Il n’y avait pas à se méprendre à l’intonation du commissaire de police ; un soupçon, le premier, venait d’effleurer son esprit. Le banquier le comprit, il tressaillit et reprit très-vite :

— J’ai fait face à mes engagements, mais au prix d’un sacrifice désagréable. Je dois ajouter que si on eût exécuté mes ordres, ces 350,000 fr. ne se seraient pas trouvés dans la caisse.

— Comment cela ?

— Je n’aime pas à avoir chez moi, la nuit, de grosses sommes. Mon caissier avait la consigne d’attendre toujours à la dernière heure pour envoyer chercher les fonds qui étaient déposés à la Banque de France. Je lui avais surtout formellement défendu de rien garder en caisse le soir.

— Vous entendez ? dit le commissaire à Prosper.

— Oui, monsieur, répondit le caissier, ce que dit M. Fauvel est parfaitement exact.

À la suite de cette explication, le soupçon du commissaire de police, loin de s’affirmer, se dissipait.

— Enfin, reprit-il, un vol a été commis. Par qui ? Le voleur est-il venu du dehors ?

Le banquier hésita un moment.

— Je ne le crois pas, répondit-il enfin.