Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/259

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M. Segmuller voulait essayer de démonter un peu cette assurance de coquin.

Il rappela donc durement à Polyte sa position, lui donnant à entendre que, de son attitude et de ses réponses dépendrait beaucoup le jugement à intervenir dans l’affaire où il se trouvait impliqué.

Polyte écoutait d’un air nonchalant et quelque peu ironique.

Dans le fait, il se souciait infiniment peu de la menace. Il avait consulté et se croyait sûr de son compte. On lui avait dit qu’il ne pouvait pas être condamné à plus de six mois de prison. Que lui importait un mois de plus ou de moins !

Le juge, qui surprit ce sentiment dans l’œil du gredin, abrégea.

— La justice, dit-il, attend de vous des renseignements sur quelques habitués du cabaret de votre mère.

— C’est qu’il y en a beaucoup, m’sieu, répondit le garnement d’une voix enrouée, traînarde, ignoble.

— En connaissez-vous un du nom de Gustave ?

— Non, m’sieu.

Insister, c’était risquer de donner l’éveil à Polyte, si par hasard il était de bonne foi ; M. Segmuller poursuivit donc :

— Vous devez, du moins, vous rappeler Lacheneur ?

— Lacheneur ?… C’est la première fois que j’entends ce nom.

— Prenez garde !… la police sait beaucoup de choses.

Le garnement ne broncha pas.

— Je dis la vérité, m’sieu, insista-t-il, quel intérêt aurais-je à mentir ?…