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chit en moins d’une demi-heure la distance qu’il venait de mettre près d’une heure à parcourir.

En arrivant au bout du sentier creux, ses regards embrassèrent avidement tout l’horizon devant lui : son canot avait disparu ; il s’avança et ne vit que la mer houleuse. Il crut s’être trompé de route ; mais l’aspect du chemin creux ouvert au milieu des falaises lui rappelait parfaitement l’endroit de son débarquement. C’était bien le même, et le canot ne devait pas être éloigné. Enfin, un examen plus attentif lui fit découvrir une masse noire balancée au loin par la houle : don Cornelio espéra.

La marée, quoique presque insensible sur ces rivages, avait sans doute, en se retirant, emporté le canot au large, pendant le sommeil de ses deux gardiens.

Le capitaine appela à voix assez basse d’abord ; puis, ne recevant pas de réponse, il haussa la voix, mais inutilement. Le canot continuait à rouler d’un bord à l’autre, sans que rien indiquât qu’on l’y eût entendu. Il cria de toutes ses forces, ce fut en vain ; l’écho seul répéta ses cris. La masse noire continuait à osciller de droite et de gauche avec une monotonie lugubre.

Il écouta et n’entendit que le bruit de la mer qui chipotait en étendant sur la grève une légère frange d’écume ; les intermittences de profond silence et de soupirs plaintifs de chaque flot mourant sur le sable portaient dans l’âme du capitaine une terreur vague d’abord, mais qui bientôt se précisa d’une manière terrible.

Deux hommes parurent tout à coup dans le canot, qui semblait vide et abandonné, et quatre bras le frappèrent à la fois de l’aviron ; puis, au lieu de revenir vers le rivage, il s’en éloigna rapidement.

« Drôles ! s’écria don Cornelio, surpris et alarmé de la manœuvre incompréhensible qu’il voyait faire à ces deux hommes : c’est moi, le capitaine Lantejas ! »

Un éclat de rire moqueur répondit aux paroles du ca-