Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/240

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il avait résolu de se présenter personnellement à l’hacienda ; mais, emporté par l’ardeur de sa vengeance, le capitaine, pour ne pas s’exposer à faiblir en revoyant Gertrudis, avait remis néanmoins toute explication avec elle et son père jusqu’à l’accomplissement d’une partie du vœu téméraire que lui avait inspiré sa douleur filiale.

On n’oublie pas, en effet, qu’il avait fait serment, sur la tête de son père, d’arracher la vie à ses meurtriers et de chercher à noyer dans le sang cette insurrection cause de sa mort.

Mais ses efforts désespérés n’avaient abouti qu’à détruire homme à homme la troupe des deux assassins, ceux-ci échappant sans cesse à sa poursuite. Enfin, après plus de deux mois depuis la mort de Valdès, le bruit se répandit qu’Arroyo et Bocardo avaient quitté la province pour aller grossir l’armée d’Hidalgo avec les débris de leur guerilla.

Don Rafael regagna l’hacienda del Valle, gardée par Caldelas. Pendant son absence, un ordre du général commandant l’armée du vice-roi lui avait été expédié pour lui enjoindre d’aller reprendre son poste au régiment des dragons de la reine.

Avant d’obéir, quoique déjà il fût en retard, don Rafael résolut de s’occuper un seul jour de ses affaires de cœur et de se rendre à las Palmas pour y courber son orgueil devant son amour.

Une justification devenait plus difficile alors qu’elle ne l’eût été deux mois auparavant aux yeux de don Mariano Silva. Les apparences s’étaient converties en réalités, les soupçons en certitudes, et don Rafael n’était plus pour lui qu’un renégat vulgaire. Quelques mots formulaient et résumaient l’opinion de l’hacendero à l’égard de don Rafael, et ces mots retentissaient à chaque instant du jour aux oreilles de doña Gertrudis comme un triste présage désormais accompli :