Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/247

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nouveau, et la voix menaçante du soldat arriva jusqu’aux oreilles des hôtes de l’hacienda.

L’hacendero tremblant sur le sort de ses deux filles livrées sans défense à ces deux anciens vaqueros, dont les compagnons obstruaient le corridor, laissa passer encore sans réponse la seconde sommation, déjà plus impérieuse que la première.

« Con mil demonios ! s’écria le bandit, il n’y a pas tant à tergiverser ! Présentez-vous à la fenêtre, si vous craignez de vous montrer face à face avec cet enragé capitaine, et dites-lui rondement la chose, sinon… »

Le clairon qui, pour la troisième fois, jeta ses retentissantes menaces, aux oreilles effrayées des deux jeunes filles, interrompit le bandit.

« À sac la maison des ennemis de l’Espagne ! » cria une, voix mâle dont l’intonation porta dans l’âme de Gertrudis un tressaillement de terreur et de joie tout ensemble.

C’était la voix de don Rafael.

« Encore un moment, s’écria don Mariano en se pré- sentant sur le péristyle qui surmontait le perron et d’où son regard pénétrait jusqu’à la plaine, en même temps qu’il s’offrait lui-même à la vue de ceux du dehors ; j’ai deux mots à dire au capitaine. Où est-il ?

— Je suis ici ; ne me voyez-vous pas ?

— Ah ! pardon, dit l’hacendero avec un sourire d’amertume ; je n’avais connu jusqu’ici le capitaine Tres-Villas que comme un ami, et je ne le reconnaissais pas dans l’homme qui menace de ruine le toit de celui dont il a été l’hôte. »

À cette phrase imprudente, dont l’hacendero n’avait pu retenir l’ironie, une vive rougeur remplaça sur le front de l’officier la pâleur dont il était couvert.

« Et moi, reprit-il, je ne vois plus en vous aujourd’hui qu’un fauteur de l’insurrection impie que j’ai juré d’étouffer, et que le maître d’une maison dont des bandits