Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/351

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Ce n’était pas sans de longs et violents combats entre son amour et son orgueil, ce n’était pas sans des efforts désespérés pour arracher de son cœur une passion qui y régnait en souveraine, que Gertrudis s’était résolue à envoyer à don Rafael le message auquel il avait juré d’obéir sans hésiter, dût-il avoir le bras levé pour frapper son plus mortel ennemi.

On a vu que son départ de Oajaca avec don Mariano avait suivi de près celui de son messager.

Quand elle avait cédé au vœu le plus ardent qu’elle formât, celui de revoir une fois encore don Rafael, ne fût-ce que pour apprendre de lui qu’elle n’était plus aimée, elle était toutefois bien loin de craindre d’entendre un pareil aveu sortir de la bouche de son amant ; son premier mouvement fut donc un mouvement de joie profonde. Il lui semblait renaître à la vie ; elle s’étonnait d’avoir si longuement lutté contre elle-même, et, pleine de confiance, elle ne doutait pas que don Rafael n’éprouvât autant de bonheur à recevoir son message qu’elle en éprouvait elle-même à le lui envoyer. C’est pourquoi elle avait fait espérer à Gaspar, pour s’assurer de sa fidélité, que le colonel Tres-Villas le récompenserait magnifiquement. Dans les circonstances critiques où se trouva le messager, il fut heureux qu’elle eût fait briller à ses yeux l’espoir d’une forte récompense ; car, si ce message arrivait enfin à sa destination, ce ne devait être que grâce à ce puissant motif.

La joie de Gertrudis, toutefois, fut de courte durée ; bientôt le doute et la défiance remplacèrent chez elle la certitude. Il y avait indubitablement entre elle et don Rafael plus qu’un malentendu né de circonstances impérieuses. Elle n’était plus aimée ; ces preuves lointaines de souvenir n’étaient qu’un jeu de hasard, et, si le colonel l’avait bannie de son cœur, c’est qu’il en aimait une autre.

C’est accablée de ces douloureuses pensées et le cœur