Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/438

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« Gare à vous ! » s’écria Bocardo à son complice, à l’aspect du colonel qui venait, par un effort soudain, de le dépasser, et qui s’élançait sur lui.

Arroyo déchargea le pistolet qu’il avait à la main, en retenant involontairement la bride de sa monture ; le coup, mal dirigé, n’atteignit pas don Rafael, dont le cheval, heurtant du poitrail le flanc de celui d’Arroyo, le renversa sur le côté.

Bocardo se jeta au travers pour donner à son associé le temps de se relever.

« Arrière, immonde putois ! » s’écria le colonel en lui faisant vider les arçons d’un coup de la poignée de son sabre.

Arroyo, froissé, meurtri, les éperons engagés sous la selle, essayait vainement de se relever, que déjà le colonel d’un côté et ses gens de l’autre l’entouraient, le sabre haut, tandis que les quatre cavaliers insurgés continuaient à s’enfuir à toute bride, et que Bocardo, les côtes brisées, gisait immobile sur le sable.

De l’endroit où ils étaient postés, les spectateurs avaient vu de loin cette double chute, mais sans deviner de quel côté demeurait l’avantage.

Pourvu que les bords du lac redevinssent solitaires. peu importait à Costal et à son compagnon d’aventures ; mais il n’en était pas de même de don Mariano.

Frappé de l’idée que l’un des acteurs de cette lutte sanglante pouvait être le colonel Tres-Villas, dont la vie lui était si précieuse depuis que celle de sa fille y était pour ainsi dire attachée, il était absorbé dans sa douloureuse incertitude, et, depuis le commencement de la terrible scène qui se passait sous ses yeux, il avait gardé le plus profond silence.

Un vif sentiment de curiosité avait également rendu muets don Cornelio et ses deux compagnons. Don Mariano ignorait donc encore que l’hacienda de San Carlos eût été prise et pillée par la bande d’Arroyo ; de son