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après les autres, les marches les plus triomphales, puis elle demandait l’opinion de son amie.

— Je ne suis pas très compétente, répondait celle-ci, j’aimerais peut-être mieux quelque chose de moins bruyant.

— Mais, sœur Hélène, si cela ne fait pas beaucoup de tapage, oncle Nestor ne sera pas content, et si je joue quelque chose de lent, il le trouvera mélancolique.

— Alors, chérie, faites comme vous croirez, ou plutôt demandez à mon frère.

Et, quand le soir venait, les répétitions recommençaient ; et puis, pour finir, Petite Nell s’enhardissait jusqu’à demander une romance, rien qu’une, à laquelle deux ou trois autres venaient toujours s’ajouter.

Et, pendant que ses mains couraient sur le clavier, il lui arrivait quelquefois de lever les yeux et de se demander, si le frère de sœur Hélène avait toujours eu cette même figure.

Comment se faisait-il alors qu’elle n’eût jamais remarqué ce qu’elle voyait si clairement à présent ? Comment avait-elle pu prendre pour une humeur farouche cette douloureuse contraction de ses sourcils ? Et quelle douceur dans ses yeux, qui ne lui semblaient que pénétrants autrefois, et quel bon sourire, d’autant meilleur qu’il était plus rare ! Que c’était drôle de faire tant de découvertes à la fois et de s’apercevoir, qu’elle était belle, cette grave figure, qui lui inspirait encore une certaine crainte, mais mélangée désormais de la plus enthousiaste admiration.