Page:Galmot - Un mort vivait parmi nous, 1922.djvu/175

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dain une lumière venait d’apparaître au fond de lui :

— Une force obscure et brutale me pousse, dit-il. C’est la destinée… Crois-tu maintenant à El Dorado ? La science ne peut pas expliquer cela. D’où viendrait tout cet or éparpillé sur le sol de la Guyane ?

Son visage est grave. Il parle d’une voix profonde et chaude, comme un apôtre cherchant à communiquer sa foi.

— Cela n’est pas sorti de mon cerveau. Toutes les générations ont cru à la légende de la Mine fabuleuse. Tu n’étais pas né, et déjà des milliers d’hommes avaient rêvé la conquête de la ville aux murs d’or massif. C’est ainsi… Aucune paillette d’or n’avait encore été découverte en Guyane, et pendant trois siècles, les expéditions se sont succédées à la recherche du trésor…

Le vieux Saramaca, aveugle, s’est glissé comme une ombre noire à nos pieds. Ses mains tremblantes palpent la table, et le banc, et nos mains tièdes.

— Il y avait dans mon enfance une Vierge que nous invoquions sous le vocable de « Notre-Dame-des-Désespérés »… Regarde cet homme qui attend la lumière depuis plus d’un demi-siècle…

Pierre Deschamps, les bras croisés sur la poitrine, n’entend ni l’humble parole du vieillard aux yeux révulsés, ni l’évocation ardente de la basi-