Page:Galmot - Un mort vivait parmi nous, 1922.djvu/220

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pées à la table, la tête profondément inclinée, sanglotait.

— Je ne peux plus rester seul… je ne peux plus.

Les hommes se regardaient avec embarras ; ils étaient troublés jusqu’au fond d’eux-mêmes par cette détresse qui s’exhalait en une lamentation contenue, douloureuse, étouffée et angoissante, comme les gémissements d’un malade.

Le forçat, d’une voix humble et contenue, s’efforçait de persuader l’ingénieur. S’adressant tour à tour à Delorme, à Pierre et à Marthe, il racontait une histoire incompréhensible que les hommes écoutaient avec stupeur. Ils crurent qu’il était devenu fou et qu’il délirait, en proie à quelque hallucination.

Il parlait du séjour qu’il venait de faire seul dans la case abandonnée :

— Lorsque je suis entré, apportant les lampes, comme chaque soir, je n’ai trouvé personne. Pendant plusieurs jours, j’ai vécu seul, n’ayant d’autre compagnie que les bêtes. Où étiez-vous allés ? et pourquoi m’avez-vous ainsi abandonné ?

— Rêves-tu ? Quelle est cette histoire ?… dit Delorme, ému par l’accent de sincérité de l’homme.

Mais le forçat prenait à témoin le journal du camp sur lequel aucune écriture n’avait été cou-