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HISTOIRE DU CANADA.

un gouvernement, on n’est pas surpris de ses embarras. Quand un gouvernement a une si haute opinion de lui-même et une si petite des peuples qu’il dirige, la sympathie doit être aussi bien faible.

Aussitôt que la dépêche de sir James Kempt, mise devant le parlement impérial, fut connue en Canada, les habitans les plus respectables des comtés de Richelieu, Verchères, St.-Hyacinthe, Rouville et Chambly, s’assemblèrent à St.-Charles sous la présidence de M. Debartzch, et déclarèrent que quoique la conduite de ce gouverneur eût fait disparaître les haines et les divisions qu’avait fait naître la politique arbitraire et extravagante de lord Dalhousie, cette dépêche réveillait les craintes les plus sérieuses, et si les deux conseils n’étaient pas réformés, l’on devait s’attendre aux conséquences les plus funestes pour le maintien de l’ordre, parce qu’il ne restait plus d’espoir de voir rétablir l’harmonie entre les différentes branches de la législature.

Sir James Kempt qui se voyait au moment d’être forcé de se prononcer sur les réformes que l’on appelait à grands cris, avait demandé son rappel pour ne pas se trouver dans les mêmes difficultés que son prédécesseur. Il savait que le pays était trop avancé pour se contenter plus longtemps de vaines théories, de sentimens vagues ou des déclarations générales, et qu’il fallait enfin lui accorder ou lui refuser d’une manière formelle et précise ce qu’il demandait. Quoiqu’il eût rétabli les magistrats destitués par son prédécesseur, qu’il eût fait de grandes réformes parmi les juges de paix ; quoiqu’il eût aussi commencé à réorganiser la milice et à rétablir dans leurs grades les officiers qui avaient perdu leurs commissions pour leurs opinions politiques, les résolutions de l’assemblée de St.-Charles lui démontraient que sa popularité finissait avec son administration.

Il fut remplacé par lord Aylmer, qui avec le même programme à suivre allait avoir en face de lui une assemblée plus nombreuse que celle de son prédécesseur, et par conséquent plus difficile encore à contenter. Le parti de la réforme s’était beaucoup accru. Tous les anciens membres libéraux qui avaient voulu se présenter avaient été réélus à de grandes majorités. 60 Canadiens français et 24 Anglais composaient la nouvelle chambre. Une forte partie de ces derniers avait été élue par les Canadiens,