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HISTOIRE DU CANADA

C’est alors que M. Morin vint se fixer à Québec vers la fin de 1836 sous prétexte d’y pratiquer comme avocat. Aussitôt les partisans de M. Papineau crurent voir quelque tactique dans cette démarche de son disciple le plus dévoué ; ils se réunirent autour de lui, ils s’organisèrent et se mirent en rapport avec les libéraux de Montréal et d’autres parties du pays, pour contrecarrer les résolutions de l’association constitutionnelle, qui parlant au nom du parti anglais, priait le roi de maintenir le conseil législatif en l’organisant de manière à tenir en échec l’influence de l’assemblée, de diviser les comtés de façon à diminuer les représentans français, de rappeler lord Gostford, et de réunir les deux Canadas. Elle s’adressait en même temps au Haut-Canada pour l’engager à favoriser ses projets, et aux Canadiens-français eux-mêmes pour leur dire qu’ils étaient trompés et opprimés par leurs meneurs.

À cette époque leur perspective était la plus triste qu’on puisse imaginer. Eux qui s’étaient bercés un instant de l’espoir d’avoir de nombreux alliés, venaient de les perdre presque tous à la fois. Sir Francis Bond Head était sorti triomphant de la lutte à Toronto. Il avait dissous la dernière chambre et était parvenu à force d’adresse et d’intrigues à faire élire une majorité de torys dans la nouvelle. Sûr maintenant d’elle, il avait convoqué aussitôt la législature, et l’assemblée avait biffé des procès-verbaux de la dernière session, les résolutions de celle du Bas-Canada que M. Papineau avait envoyées à son président. En même temps Head lui avait communiqué les dépêches du bureau colonial qui approuvaient sa conduite. La politique de Downing Street était de briser la dangereuse alliance qui avait paru s’établir entre le Haut et le Bas-Canada, menacer le Bas où le danger était le plus grand, et mettre la totalité de la population en lutte une partie contre l’autre. Cette politique avait donc réussi. Dans le Haut-Canada tout marchait à merveille ; et il en était de même dans les autres provinces. Le Nouveau-Brunswick avait accepté les propositions de l’Angleterre, et la Nouvelle-Écosse, qui avait d’abord été plus ferme, avait révoqué les résolutions qu’elle avait passées contre l’administration, de sorte que la commission qui achevait ses travaux, se voyait autorisée par toutes ces défec-