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HISTOIRE DU CANADA

bla dans le mois d’avril. La tranquillité était déjà tellement rétablie que l’on renvoyait partout dans leurs foyers les volontaires armés pendant les troubles.

Quand lord Durham arriva à Québec le 27 mai, tout était dans une paix profonde. Il débarqua le 29, au bruit de l’artillerie et au milieu d’une double haie de soldats, pour se rendre au château St.-Louis, où il fit son installation et prêta les sermens ordinaires. Il voulut signaler son avénement au pouvoir par un acte de grâce en faveur des détenus politiques ; mais lorsqu’il demanda les officiers de la couronne, aucun ne se trouva présent pour lui répondre. Contre l’usage les conseillers exécutifs ne furent point assermentés. Il adressa une proclamation au peuple en se servant du langage d’un homme qui se méprend complètement sur la manière avec laquelle on doit s’exprimer en Amérique, et qui veut en imposer par une affectation recherchée au peuple dont le sort est entre ses mains. « Ceux qui veulent sincèrement et consciencieusement la réforme et le perfectionnement d’institutions défectueuses, recevront de moi, disait-il, sans distinction de parti, de race ou de politique, l’appui et l’encouragement que leur patriotisme est en droit d’avoir ; mais les perturbateurs du repos public, les violateurs des lois, les ennemis de la couronne et de l’empire britannique trouveront en moi un adversaire inflexible. » Et plus loin en parlant du rétablissement de la constitution, il observait : « C’est de vous peuple de l’Amérique britannique, c’est de votre conduite et de l’étendue de votre coopération avec moi qu’il dépendra principalement que cet événement soit retardé ou immédiat. J’appelle donc, de votre part, les communications les plus franches, les moins réservées. Je vous prie de me considérer comme un ami et comme un arbitre, toujours prêt à écouter vos vœux, vos plaintes et vos griefs, et bien décidé d’agir avec la plus stricte impartialité… »

Or ce langage, comme on le verra, ne pouvait faire qu’en imposer au loin, car dans le pays même, il ne devait avoir aucune signification puisque tous les pouvoirs politiques étaient éteints, excepté ceux que lord Durham réunissait en sa personne. Cela était si vrai, qu’il renvoya immédiatement le conseil spécial de sir John Colborne, qui avait déjà passé trop d’ordonnances plus ou moins entachées de l’esprit du jour ; qu’il fit informer les