Page:Garneau - Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours, tome IV, 1852.djvu/290

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
294
HISTOIRE DU CANADA

grande mesure pour terminer cette question malheureuse d’un seul coup et sans discussion ; cette mesure fut une amnistie générale, qu’il proclama le jour même fixé pour le couronnement de la reine Victoria. Il n’excepta que vingt-quatre prévenus, auxquels on laissa cependant la perspective de rentrer dans leurs foyers aussitôt que cela paraîtrait compatible avec la paix et la tranquillité publique, et les assassins d’un Canadien et d’un officier qui portait des dépêches dans le pays insurgé, qui avaient été tués au commencement des troubles. Ceux sur les vingt-quatre qui se trouvaient en prison, devaient être envoyés aux îles de la Bermude, et ceux qui se trouvaient à l’étranger devaient y rester jusqu’à ce qu’on pût permettre aux uns et aux autres de revenir dans le pays. Il ne pouvait adopter de moyen plus sage, ni plus humain pour sortir d’un grand embarras ; mais malheureusement en en exilant quelques uns aux îles de la Bermude sans procès, il violait les lois, et aussitôt que cet acte fut connu en Angleterre, il excita un grand bruit parmi ceux qui tiennent non sans raison aux formalités de la justice, ainsi que parmi les ennemis de ses prétentions dans son pays.

En Canada cette amnistie fut bien reçue, et comme lord Durham se tenait toujours dans l’ombre vis-à-vis des Canadiens sur les mesures qu’il entendait recommander à leur égard, ils aimaient à en tirer un bon augure et à se bercer d’espérances qu’entretenaient avec art les émissaires du nouveau vice-roi. Ainsi le Canadien du 8 juin contenait un article d’un employé du gouverneur, M. Derbyshire, contre l’union des deux Canadas en réponse aux journaux anglais de Montréal. Dans toutes les occasions on parlait des abus crians des administrations précédentes, de l’ignorance et de la vénalité des fonctionnaires, de la modération des représentans du peuple d’avoir enduré si longtemps un pareil état de choses. Mais tout cela n’était que pour attirer la confiance, comme la proclamation dont nous avons parlé plus haut, dans laquelle lord Durham invitait tout le monde à venir épancher dans son sein ses griefs et ses douleurs.

M. Wakefield fut député secrètement vers quelques-uns des meneurs canadiens. Il vit M. LaFontaine plusieurs fois à Montréal ; il chercha à le persuader des bonnes intentions du gouverneur, qui nonobstant les ordres contraires de lord Glenelg, scan-