Page:Garnir - Le Commandant Gardedieu, 1930.djvu/19

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J’ai compris une fois de plus, en rentrant, la nuit d’hier, de mon voyage dans le Midi, que le train qui vient secouer ainsi notre sommeil provincial a quelque chose de symbolique — mais, avant de philosopher, mettons notre journal au courant.

***

C’est un homme nouveau que le rapide a ramené à Mons, un homme édifié pour toujours sur des choses qui, jusque là, avaient été pour lui obscures. Je la connais, maintenant, « la terre d’élection », « la terre du miracle » sur le compte de laquelle les poètes de là-bas nous ont tant abusés ! Je la connais pour avoir étudié le type de Tartarin dans ses concitoyens, ce bon et néfaste Tartarin qui aurait fini par faire « tourner à sots » tous les Montois par son don d’imposture, si ma lettre pressante ne l’avait décidé à quitter notre ville de Mons.

Chose heureuse : à mesure que le train approchait de la Belgique, je me sentais allégé, réconforté, épuré : c’était un autre air, un air salubre, un air familial, que je respirais, loin, enfin, de ces paysages chromos de la Côte d’Azur, de ces sites artificiels, de ces flots trop bleus ! Je revenais à la Vérité. Ayant moralement la gueule de bois (si j’ose dire) je