Page:Gaskell - Les Amoureux de Sylvia.djvu/27

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goûter les éloges enthousiastes que son patron accordait à cette charmante jeune fille. Ses refus malséants, son ingratitude envers Philip, révoltaient le sens droit et l’équité naturelle de la demoiselle de magasin. Peut-être aussi se trouvait-elle blessée dans un autre sentiment qu’elle ne s’avouait pas à elle-même. Toujours est-il qu’elle s’étonnait et pour ainsi dire s’alarmait quelque peu.

IV

PHILIP HEPBURN.

La ferme récemment prise à bail par le père de Sylvia était située sur une de ces hauteurs rocailleuses qui bordent immédiatement certaines portions des rivages anglais. Les établissements agricoles placés ainsi étaient, il y a soixante et dix ans, — et furent longtemps encore, — des exploitations mixtes, où la contrebande entrait pour sa bonne part. Elle fumait avec un zèle admirable des terres obstinément stériles, et sous l’abri mystérieux des rochers, maint et maint objet prohibé demeurait en entrepôt, jusqu’à ce que le fermier envoyât des gens de confiance chercher pour lui, dans de grands paniers d’osier, une provision de sables et de varechs plus ou moins authentiques, qui étaient censés devoir servir à l’engrais de ses champs. Tour à tour matelot, contrebandier, marchand de chevaux, fermier enfin, Robson était un de ces changeants aventuriers qui aident rarement à faire prospérer une famille, un de ces hommes qui sont à la fois aimés et censurés de tous leurs voisins. Il avait épousé tard, et sans beaucoup de prudence, une tante de Philip Hepburn par qui ce jeune homme