Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/144

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gure actuelle je me ferais enfermer comme fou. S’il avait voulu se débarrasser définitivement de moi, il n’avait qu’à pousser la pointe de son épée ; j’étais désarmé, à sa merci ; la justice des hommes n’avait rien à y voir ; les formes du duel étaient parfaitement régulières et tout s’était passé selon l’usage. ― Allons ! pensons à Prascovie, et pas de terreur enfantine ! Essayons du seul moyen qui me reste de la reconquérir ! »

Et il prit comme Octave la tige de fer que le docteur Balthazar Cherbonneau lui présentait.

Fulgurés par les conducteurs de métal chargés à outrance de fluide magnétique, les deux jeunes gens tombèrent bientôt dans un anéantissement si profond qu’il eût ressemblé à la mort pour toute personne non prévenue : le docteur fit les passes, accomplit les rites, prononça les syllabes comme la première fois, et bientôt deux petites étincelles apparurent au-dessus d’Octave et du comte avec un tremblement lumineux ; le docteur reconduisit à sa demeure primitive l’âme du comte Olaf Labinski, qui suivit d’un vol empressé le geste du magnétiseur.

Pendant ce temps, l’âme d’Octave s’éloignait lentement du corps d’Olaf, et, au lieu de rejoindre le sien, s’élevait, s’élevait comme toute joyeuse d’être libre, et ne paraissait pas se soucier de rentrer dans sa prison. Le docteur se