Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/201

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— Oh ! parfaitement, répondit le chœur en allongeant avec un ensemble admirable l’index et le petit doigt.

— Et ce monsieur, dit Timberio, n’était autre que M. Paul d’Aspremont.

— Celui qui loge au numéro 3, demanda le chef, et à qui j’envoie son dîner sur un plateau ?

— Précisément, répondit la plus jeune et la plus jolie des servantes ; je n’ai jamais vu de voyageur plus sauvage, plus désagréable et plus dédaigneux ; il ne m’a adressé ni un regard ni une parole, et pourtant je vaux un compliment, disent tous ces messieurs.

— Vous valez mieux que cela, Gelsomina, ma belle, dit galamment Timberio ; mais c’est un bonheur pour vous que cet étranger ne vous ait pas remarquée.

— Tu es aussi par trop superstitieux, objecta le sceptique Scazziga, que ses relations avec les étrangers avaient rendu légèrement voltairien.

— À force de fréquenter les hérétiques tu finiras par ne plus même croire à saint Janvier.

— Si Gennaro s’est laissé tomber à la mer, ce n’est pas une raison, continua Scazziga qui défendait sa pratique, pour que M. Paul d’Aspremont ait l’influence que tu lui attribues.

— Il te faut d’autres preuves : ce matin je l’ai vu à la fenêtre, l’œil fixé sur un nuage pas plus gros que la plume qui s’échappe d’un oreiller décousu, et aussitôt des vapeurs noires se sont