Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/293

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tué trois hommes et en avait blessé grièvement cinq ou six. Sa renommée était si bien établie en ce genre, qu’il ne se battait plus. Les duellistes les plus sur la hanche le saluaient poliment et, les eût-il regardés de travers, évitaient de lui marcher sur le pied. Si quelqu’un de ces rodomonts eût tué Altavilla, il n’eût pas manqué de se faire honneur d’une telle victoire. Restait la supposition d’un assassinat, qu’écartait le billet trouvé sur la poitrine du mort. On contesta d’abord l’authenticité de l’écriture ; mais la main du comte fut reconnue par des personnes qui avaient reçu de lui plus de cent lettres. La circonstance des yeux bandés, car le cadavre portait encore un foulard noué autour de la tête, semblait toujours inexplicable. On retrouva, outre le stylet planté dans la poitrine du comte, un second stylet échappé sans doute de sa main défaillante : mais si le combat avait eu lieu au couteau, pourquoi ces épées et ces pistolets qu’on reconnut pour avoir appartenu au comte, dont le cocher déclara qu’il avait amené son maître à Pompeï, avec ordre de s’en retourner si au bout d’une heure il ne reparaissait pas ?

C’était à s’y perdre.

Le bruit de cette mort arriva bientôt aux oreilles de Vicè, qui en instruisit sir Joshua Ward. Le commodore, à qui revint tout de suite en mémoire l’entretien mystérieux qu’Altavilla avait eu avec lui au sujet d’Alicia, entrevit con-