Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/363

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à l’instant où les rideaux de sa litière s’étaient un peu écartés, et que depuis cet instant il se mourait d’amour pour elle.

« Vraiment, dit la dame, votre passion est née si subitement que cela ? je ne croyais pas que l’amour vînt si vite. Je suis effectivement la femme que vous avez rencontrée hier ; je me rendais au bain dans ma litière, et comme la chaleur était étouffante, j’avais relevé mon voile. Mais vous m’avez mal vue, et je ne suis pas si belle que vous le dites. »

En disant ces mots, elle écarta son voile et découvrit un visage radieux de beauté et si parfait que l’envie n’aurait pu y trouver le moindre défaut.

Vous pouvez juger quels furent les transports de Mahmoud-Ben-Ahmed à une telle faveur ; il se répandit en compliments qui avaient le mérite, bien rare pour des compliments, d’être parfaitement sincères et de n’avoir rien d’exagéré. Comme il parlait avec beaucoup de feu et de véhémence, le papier sur lequel ses vers étaient transcrits s’échappa de sa manche et roula sur le plancher.

« Quel est ce papier ? dit la dame ; l’écriture m’en paraît fort belle et annonce une main exercée.

― C’est, répondit le jeune homme en rougissant beaucoup, une pièce de vers que j’ai composée cette nuit, ne pouvant dormir. J’ai