Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/449

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de Thèbes était envoyé par lui ; il voulait vous empêcher d’aller à la réunion des peuples ténébreux, dans les cités inférieures. Avez-vous cinq pièces d’or pour me racheter ?

— Hélas ! non. Mes pierreries, mes anneaux, mes bourses d’or et d’argent, tout m’a été volé, répondit la princesse Hermonthis avec un soupir.

— Princesse, m’écriai-je alors, je n’ai jamais retenu injustement le pied de personne : bien que vous n’ayez pas les cinq louis qu’il m’a coûtés, je vous le rends de bonne grâce ; je serais désespéré de rendre boiteuse une aussi aimable personne que la princesse Hermonthis. »

Je débitai ce discours d’un ton régence et troubadour qui dut surprendre la belle Égyptienne.

Elle tourna vers moi un regard chargé de reconnaissance, et ses yeux s’illuminèrent de lueurs bleuâtres.

Elle prit son pied, qui, cette fois, se laissa faire, comme une femme qui va mettre son brodequin, et l’ajusta à sa jambe avec beaucoup d’adresse.

Cette opération terminée, elle fit deux ou trois pas dans la chambre, comme pour s’assurer qu’elle n’était réellement plus boiteuse.

« Ah ! comme mon père va être content, lui qui était si désolé de ma mutilation, et qui avait, dès le jour de ma naissance, mis un peuple tout entier à l’ouvrage pour me creuser un tombeau