Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/450

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si profond qu’il pût me conserver intacte jusqu’au jour suprême où les âmes doivent être pesées dans les balances de l’Amenti. — Venez avec moi chez mon père : il vous recevra bien, vous m’avez rendu mon pied. »

Je trouvai cette proposition toute naturelle ; j’endossai une robe de chambre à grands ramages, qui me donnait un air très pharaonesque ; je chaussai à la hâte des babouches turques, et je dis à la princesse Hermonthis que j’étais prêt à la suivre.

Hermonthis, avant de partir, détacha de son col la petite figurine de pâte verte et la posa sur les feuilles éparses qui couvraient la table.

« Il est bien juste, dit-elle en souriant, que je remplace votre serre-papiers. »

Elle me tendit sa main, qui était douce et froide comme une peau de couleuvre, et nous partîmes.

Nous filâmes pendant quelque temps avec la rapidité de la flèche dans un milieu fluide et grisâtre, où des silhouettes à peine ébauchées passaient à droite et à gauche.

Un instant, nous ne vîmes que l’eau et le ciel.

Quelques minutes après, des obélisques commencèrent à pointer ; des pylônes, des rampes côtoyées de sphinx se dessinèrent à l’horizon.

Nous étions arrivés.

La princesse me conduisit devant une mon-