Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/127

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sant à augmenter les terreurs du nègre ; vous savez que Zamore ne peut vous souffrir et qu’il a le bras solide ; il vous écorchera tout vif comme une anguille. ― Comptez là-dessus, monsieur Jack. »

Jack ramassa la chatte, la porta dans sa niche, lui plia les quatre pattes sous le ventre, rangea sa queue en cercle, lui ouvrit les yeux de façon à lui donner une apparence de vie, puis il fut se cacher dans le grenier, derrière une pile de foin, pour attendre que le nuage fût passé, non sans avoir fourré dans ses poches une bouteille de vin, du pain et un grand morceau de viande froide.

Puisque nous en sommes sur le chapitre de la chatte, nous justifierons Musidora du reproche de cruauté qu’on lui aura peut-être fait pour avoir tué sa bête favorite. ― Musidora pensait qu’elle allait mourir elle-même et que peut-être sa chatte, après sa mort, serait réduite à courir sur les toits par la pluie et la neige, et exposée à toutes les horreurs de la famine (perspective affligeante !). ― Elle a été féroce par bonté. ― D’ailleurs, elle l’a fait très proprement empailler et mettre sous un globe bordé de peluche rouge ; elle est couchée sur un petit coussin de soie bleu de ciel, et de ses beaux yeux d’émail s’échappe une lueur verdâtre, absolument comme si elle était vivante ; il semble qu’on l’entende faire ronron. ― Qui de nous peut se