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pos conduisant à une piscine, dont l’eau tiède et diamantée baissait jusqu’aux dernières marches ou montait jusqu’au niveau du sol, selon la profondeur que l’on voulait obtenir.

Le reste de l’espace était rempli par des orangers, des tulipiers, des angsoka à fleurs jaunes, des palmistes, des aloès, et toutes sortes de plantes tropicales venant en pleine terre.

Pour aider à comprendre ce miracle, nous dirons que l’Eldorado était un palais sous cloche.

Fortunio, frileux comme un Indou, pour se composer une atmosphère à sa guise, avait d’abord fait construire une serre immense qui englobait complètement son nid merveilleux.

Une voûte de verre lui tenait lieu de ciel ; cependant il n’était pas privé de pluie pour cela : quand il désirait changer le beau invariable de son atmosphère de cristal, il commandait une pluie, et il était servi sur-le-champ. D’invisibles tuyaux criblés de trous faisaient grésiller une rosée de perles fines sur les feuilles ouvertes en éventail ou bizarrement découpées de sa forêt vierge.

Des milliers de colibris, d’oiseaux-mouches et d’oiseaux de paradis voltigeaient librement dans cette immense cage, scintillaient dans l’air comme des fleurs ailées et vivantes ; des paons, au col de lapis-lazuli, aux aigrettes de rubis, traînaient magnifiquement sur le gazon leur queue semée d’yeux étoilés.