Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/209

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que ce costume aurait pu avoir de trop éclatant et de trop précis.

Elle avait les pieds nus, avec un anneau de brillants à chaque orteil ; un cercle d’or lui ceignait la cheville ; ses bras étaient chargés de trois bracelets, deux près de l’épaule et l’autre au poignet.

Au cas où elle aurait voulu marcher et descendre dans le jardin, fantaisie qui lui prenait rarement, une paire de babouches d’une délicatesse et d’une mignonnerie admirables, la pointe un peu recourbée en dedans, à la siamoise, était posée à côté de son divan.

Sa toilette achevée, elle demanda sa pipe et se mit à fumer de l’opium. Rima-Pahes faisait tomber du bout d’une aiguille d’argent, sur le champignon de porcelaine, la pastille liquéfiée à la flamme d’un charbon de bois odorant, tandis que Keni-Tambouhan agitait doucement deux grands éventails de plumes de faisan-argus, et que la belle Cambana, assise à terre, chantait, en s’accompagnant sur une guzla à trois cordes, le pantoum de la colombe de Patani et du vautour de Bendam.

La fumée aromatique et bleuâtre de l’opium s’échappait en légers flocons des lèvres rouges de Soudja-Sari, qui se plongeait de plus en plus dans un oubli délicieux de toutes choses. — Rima-Pahes avait déjà renouvelé six fois la pastille.