Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/525

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

syndon, se fermait au-dessus des chevilles par des cercles ornés de clochettes d’or et d’argent, et complétait cette toilette d’une richesse bizarre et tout à fait contraire au goût grec. Mais, hélas ! un flammeum couleur de safran masquait impitoyablement le visage de Nyssia qui paraissait gênée, bien qu’elle eût un voile, de voir tant de regards fixés sur elle, et faisait souvent signe à un esclave placé derrière d’abaisser le parasol de plumes d’autruche pour la mieux dérober à l’empressement de la foule.

Candaule avait eu beau la supplier, il n’avait pu la déterminer à quitter son voile, même pour cette occasion solennelle. La jeune barbare avait refusé de payer à son peuple sa bienvenue de beauté. ― Le désappointement fut grand ; Lamia prétendit que Nyssia n’osait se découvrir de peur de montrer sa double prunelle ; le jeune débauché resta convaincu que Théano de Colophon était plus belle que la reine de Sardes, et Gygès poussa un soupir, lorsqu’il vit Nyssia, après avoir fait agenouiller son éléphant, descendre sur les têtes inclinées des esclaves damascènes comme par un escalier vivant jusque sur le seuil de la demeure royale, où l’élégance de l’architecture grecque se mêlait aux fantaisies et aux énormités du goût asiatique.