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aventures du baron de münchhausen.

Comme mon lithuanien allait extrêmement vite, je me trouvai le premier sur le dos des fuyards, et, voyant que l’ennemi courait si bien vers l’autre issue de la ville, je jugeai bon de m’arrêter sur la place du marché et de faire sonner le rassemblement. Mais figurez-vous mon étonnement, messieurs, en ne voyant autour de moi ni trompette ni aucun de mes hussards !

— Que sont-ils devenus ? me dis-je ; se seraient-ils répandus dans les rues ?

Ils ne pouvaient cependant pas être bien loin, et ne devaient pas tarder à me rejoindre. En attendant, je menai mon lithuanien à la fontaine qui occupait le milieu de la place, pour l’abreuver. Il se mit alors à boire d’une façon inconcevable, sans que cela parût le désaltérer : j’eus bientôt l’explication de ce phénomène singulier, car, en me retournant pour regarder si mes gens n’arrivaient pas, qu’imaginez-vous que je vis, messieurs ? Tout l’arrière-train de mon cheval était absent et coupé net. L’eau s’écoulait par derrière à mesure qu’elle entrait par devant, sans que la bête en conservât rien.

Comment cela était-il arrivé ? je ne pouvais m’en rendre compte, lorsque, enfin, mon hussard arriva du côté opposé à celui par lequel j’étais venu et, à travers un torrent de cordiales félicitations et d’énergiques jurons, me rapporta ce qui suit. Tandis que je m’étais jeté pêle-