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LES DANSEURS ESPAGNOLS.

graphique si monotone de sa nature. Il me semble que l’Opéra devrait attirer à lui tous les plus beaux danseurs et les plus belles danseuses du monde, tout ce qui a une célébrité dans ce genre. Croit-on, par exemple, qu’un rôle de bayadère n’offrirait pas un attrait fort vif, exécuté par une véritable bayadere de Calcutta ou de Masulipatam ? Pourquoi n’a-t-on pas des almées au théâtre de la rue Lepelletier ? Nos relations nouvelles avec l’Orient permettraient de s’en procurer sans beaucoup de frais ni de peine.

M. Lubbert, ancien directeur de l’Opéra et bon juge en cette matière, qui a voyagé dans les échelles du Levant, affirme que rien n’approche de la perfection de leurs danseuses. Il ne faudrait cependant pas croire d’après ceci que nous voudrions que les rôles chinois fussent remplis par des Chinois exclusivement, et ainsi de suite ; nous admettons trop largement la convention dans l’art pour descendre à de pareilles puérilités ; mais certainement l’art chorégraphique, art muet et positif, se prête plus que tout autre à cette innovation qui ne peut qu’ajouter du piquant au canevas si fatalement ennuyeux des ballets ; le saltarello et la tarentelle dansés par des Romains et des Napolitains, la cachucha, la jota aragonesa, le zapateado par des Espagnols le pas des schalls par des almées et des bayadères offriraient assurément un attrait qu’ils n’ontpas, exécutés