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VENTE DU MOBILIER


DE


VICTOR HUGO


EN 1852



S’il y a quelque chose de triste au monde, c’est une vente après décès. La foule entre de plain-pied dans un intérieur fermé jusque-là, et qui ne s’ouvrait qu’à la parenté ou qu’à l’amitié ; elle se promène partout, avide et curieuse, surtout si la mort a joui de quelque célébrité, profanant les recoins secrets, bourdonnant autour de l’autel des lares domestiques. Ces meubles, qui gardent encore l’empreinte de la vie, ces livres laissés ouverts sur une table, comme pour en reprendre plus tard la lecture ; ces pendules au balancier immobile où l’œil du maître a lu sa dernière heure ; ces portraits des aïeux ou d’êtres plus chers encore ; ces tableaux orgueil de la maison ; tous ces petits objets familiers, dont se compose la physionomie d’une maison, s’en vont dispersés comme des feuilles éparpillées au vent, deçà, delà, perdant le sens que leur donnait leur réunion, commencer ailleurs une autre exis-