Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/201

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lution d’un problème. Parfois il s’enfermait dans une situation, et il y restait une semaine entière sans pouvoir en sortir, comme cela peut vous arriver au bout d’un couloir, dans une chambre inhabitée dont le vent a fermé la porte sur vous, et dont vous n’avez pas la clef. Il descendait par la fenêtre, se hissait par le tuyau de la cheminée, ou fabriquait une fausse clef avec un clou.

Dès qu’il voyait un effet, il y marchait à travers tous les obstacles, et, pour donner toute sa valeur à un mot, il ne craignait pas d’imposer le mutisme pendant deux ou trois actes à un principal personnage. Eschyle d’ailleurs n’en faisait pas d’autres, et son Prométhée enchaîné n’ouvre pas la bouche pendant toutes les premières scènes de la tragédie. Il a fait des charpentes de drame aussi enchevêtrées que les forêts des cathédrales.

Aussi nous lui disions, par manière de plaisanterie, qu’il devait exécuter ses pièces d’après des modèles en bois. Quand il donna, — et on sait avec quel succès ! — le Sonneur de Saint-Paul, ce fut un grand émoi parmi les feuilletonnistes pour en faire l’analyse. N’en pouvant venir à bout, nous allâmes requérir Bouchardy, qui était alors noire voisin, pour qu’il nous guidât à travers ce labyrinthe, dont il devait connaître mieux que personne les détours. Nous avions déjà écrit sous sa dictée, ou d’après ses indications, la valeur d’environ neuf colonnes, et nous n’en étions encore qu’à la moitié du premier acte. Il eût été plus simple