Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/270

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qui n’auraient eu besoin que d’être grandies pour faire aussi bonne figure sur les places que celles de Gattamelala et du général Colleoni. Car, ne craignons pas de le répéter, Barye n’est pas seulement un admirable faiseur d’animaux, c’est un statuaire dans toute la force du mot, du plus grand goût et du plus grand style. On le vit bien en 1850, lorsqu’il fit sa rentrée au Salon, rentrée triomphale, et qui le mit, pour tout le monde, à ce premier rang qu’il méritait depuis si longues années. Le Centaure dompté par un Lapithe montra que ce romantique proscrit par le jury était le statuaire moderne qui se rapprochait le plus de Phidias et de la sculpture grecque. Ce Lapithe, aux formes robustes et simples, beau comme l’idéal, vrai comme la nature ; aurait pu figurer dans le fronton du Parthénon, à côté de l’Ilissus, et le Centaure se mêler aux cavalcades des métopes. L’on s’étonna que celui qui faisait si bien les bêtes réussît autant lorsqu’il modelait des hommes et des héros, comme si la forme n’était pas une dans sa diversité apparente et pouvait avoir des secrets pour un contemplateur doué d’un œil aussi perçant que Barye !

Le statuaire des lions a exécuté récemment quatre groupes en ronde bosse pour les pavillons du Louvre : la Paix, la Guerre, la Force protégeant le Travail, l’Ordre comprimant les pervers. Dans ces groupes, les figures sont heureusement combinées avec des animaux qui en précisent le sens allégorique. Elles ont celle tranquillité de lignes et cette