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ISOLINE

maines, s’était exalté jusqu’à l’héroïsme. Tout de suite elle fut résolue à sauvegarder son ami et à ne compromettre qu’elle. Elle médita toute la nuit, surprise elle-même de voir succéder à ses fureurs inutiles le calme d’une volonté inébranlable.

La trahison de la sœur converse lui enseigna la dissimulation : on vit sa douleur se fondre dans les larmes et, à la chapelle, elle s’abîmait dans des prières ardentes.

Un bruit, habilement lancé, commençait à circuler par la ville et arriva aux oreilles de Gilbert. Le malheureux, après avoir vainement cherché la retraite d’Isoline, éperdu de rage et de douleur, se voyait cloué sur son lit par un retour dangereux de son mal.

Sylvie se chargea de lui faire savoir comment on parlait de lui : on racontait que la riche héritière de Kerdréol avait été recherchée par un marin sans fortune ; mais que le père était arrivé à point pour s’opposer à une union disproportionnée.

— « Tu voulais l’épouser, ajoutait Mme Aubrée ; ce n’était pas bête, cela, mais bien ambitieux tout de même. »

Gilbert, qui n’avait pour toute fortune que son