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LE FRUIT DÉFENDU.

fleurs, entre les façades jaunes des maisons, décorées de banderoles jusqu’à leurs toitures, à l’angle desquelles des dragons verts éclataient de rire.

Le premier jour de l’année, des vendeurs ambulants s’établissent dans la rue des Marchands-de-Lanternes, et y répandent le long des maisons d’éblouissantes merveilles, que le peuple achète ou contemple. Ce sont des jades délicatement sculptés et transparents comme des ongles de princesse, des monstres de bronze grotesques et charmants, dont les gros yeux de porcelaine peinte regardent fixement ; puis des coffrets de laque, de petites figures en or, des peintures historiques ou fabuleuses, encadrées de bambous et de perles, de la toile d’ortie exportée de Nankin, une grande quantité de meubles somptueux et de costumes magnifiques, vendus par les personnes riches qui dédaignent les objets vieux de plus de douze lunes, et mille choses encore.

Cette année-là l’affluence des marchands et la richesse des marchandises étaient telles que les plus vieux habitants de Canton déclaraient qu’ils n’avaient jamais rien vu de pareil ; les enfants criaient d’étonnement en levant les bras au ciel ; les femmes,