Page:Gautier - Isoline et la Fleur Serpent, Charavay frères, 1882.djvu/79

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
79
ISOLINE

l’absence d’Iseult, tandis que son page, du haut du donjon, cherchait anxieusement un navire sur la mer. C’est incroyable, n’est-ce pas, que d’ici l’on puisse voir la mer ; pourtant du sommet de la tour l’on découvre un horizon sans fin : les plaines, les coteaux, les côtes déchiquetées, puis la mer et tout au loin les îles presque indistinctes ; mais vous ne regardez pas.

— J’écoute, dit Gilbert, qui la buvait des yeux.

— C’est vrai, dit Damont, dans les jours clairs, on voit Jersey et le mont Saint-Michel.

— J’ai bien souvent rêvé de retrouver leur tombeau, continua-t-elle comme se parlant à elle-même, car ils sont morts ici : « il la serra si fort dans ses bras, en lui disant le dernier adieu, qu’il lui fit partir le cœur. »

Elle soupira.

— « Je les ai bien aimés, murmura-t-elle, emportée par une rêverie.

— Croyez-vous donc qu’un pareil amour ne puisse plus se rencontrer ? dit Gilbert d’une voix tremblante.

— Qui donc l’inspirerait ? répondit-elle. Regardez ces châteaux superbes dont la majesté nous