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ISOLINE

pâle ; mais la surprise que lui causait cette volonté qui ne cédait pas au premier mot devant la sienne, n’était pas sans charme.

L’auberge, en même temps cabaret et ferme, était noire et peu engageante. Dans la première salle aussi sombre qu’une cave, des hommes attablés, les bras sur la table, comme anéantis, semblaient perdus dans la contemplation de leur bolée de cidre. L’aubergiste gracieuse, avec un sourire rose et blanc, indiqua vite une porte qui donnait sur la cour.

De grandes masures vermoulues, qui semblaient très hautes, l’entouraient en carré ; elle était très encombrée de fumier où des volailles piétinaient, et les étables mal tenues remplissaient d’une odeur âcre. Au fond un escalier extérieur, qui grinçait sous les pas, accédait à une salle donnant sur la campagne. La fenêtre du côté des champs était enguirlandée par un rosier précoce tout en fleur ; c’était d’ailleurs le seul luxe de cette vaste chambre, blanchie à la chaux, complètement vide, hors, dans un coin, une table longue et deux bancs de bois, et sur la muraille, comme perdue, une image coloriée de Jésus avec un cœur fumant au milieu de l’estomac.

Gilbert fit mettre la table près de la fenêtre ; une