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SYRIE.

d’Acre. De grand matin, Gérard se mit à la recherche de son pacha. On le désignait familièrement sous le sobriquet de Guezluk (l’homme aux lunettes), d’après l’habitude orientale de distinguer les gens par quelque particularité caractéristique de conformation, de costume ou d’habitude.

C’était jour d’audience, et le pacha reçut Gérard d’une manière froide, vague, presque hautaine ; mais ce n’était qu’une pose de dignité faite pour ne pas choquer les Orientaux présents, car il retint notre voyageur à dîner, et alors il lui témoigna beaucoup d’aménité et de bienveillance ; le matin il avait été pacha, le soir il était civilisé. Tout haut fonctionnaire turc ressemble à ce personnage de ballet qui est moitié paysan et moitié seigneur. Il montre le côté gentleman à l’Europe. Il est toujours un pur Osmanli pour l’Asie. Les préjugés des populations font d’ailleurs une nécessité de cette politique.

Le pacha avait étudié à l’école de Metz, dont Gérard connaissait plusieurs élèves, et la conversation, mêlée de souvenirs com-