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L’ORIENT.

trouver le remède, envahissait la plupart des passagers, qui regagnaient leurs cabines pour essayer s’ils trouveraient quelque soulagement dans la position horizontale. D’autres restaient sur le pont pelotonnés sous leurs couvertures de voyage, n’osant affronter l’odeur écœurante et fade qu’exhale l’intérieur du navire. Cependant un groupe de jeunes femmes, au teint chaudement pâle, aux grands yeux noirs, qui semblaient allongés par le k’hol, encapuchonnées de mantes rouges ou rayées de couleurs éclatantes, formaient une espèce de décaméron abrité par la paroi du tillac, et souriaient avec une pitié légèrement moqueuse aux galanteries que des jeunes gens, comprimant à peine leurs nausées, essayaient de leur dire. Les femmes savent trouver le moyen d’être jolies et parées en mer, ce qui est difficile.

Une traversée, lorsqu’on n’aperçoit aucune terre et qu’on flotte entre le ciel et l’eau dans ce cercle d’horizon qui, n’en déplaise aux poëtes, ne donne pas l’idée de l’infini, ne présente pas beaucoup de sujets de descrip-