Page:Gautier - L’Orient, tome 2, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/171

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
161
ÉGYPTE.

Cette description, d’une scrupuleuse exactitude, ne donne pas une idée bien séduisante d’un village fellah. Eh bien, plantez à côté de ces cubes de terre grise un bouquet de dattiers, agenouillez un ou deux chameaux devant ces portes, semblables à des ouvertures de terriers, faites-en sortir une femme drapée de sa longue chemise bleue, tenant un enfant par la main et portant une amphore sur la tête, faites glisser sur tout cela un rayon de soleil, et vous aurez un tableau plein de charme et de caractère, qui ravirait tout le monde sous le pinceau de Marilhat.

Une remarque qui se présente à l’esprit du voyageur le moins attentif, dès ses premiers pas dans cette basse Égypte où, depuis un temps immémorial, le Nil accumule son limon par minces couches, c’est l’intimité profonde du fellah avec la terre. Le nom d’autochthone est véritablement celui qui lui convient : il sort de cette argile qu’il foule : il en est pétri et s’en dégage à peine. Comme un enfant le sein de sa nourrice, il la manipule, il la presse, pour faire jaillir de cette brune