Page:Gautier - L’Orient, tome 2, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
17
ACROBATES INDIENS.

Benoîton, malgré un froid assez piquant ; mais cela réchauffe d’aller en Espagne et dans l’Inde.

Une corde lâche, fixée à deux chevalets, traversait le cirque, et du cintre tombait un trapèze. De la porte qui sert de coulisse aux chevaux, une svelte figure, dont un maillot blanc rosé dessinait les formes gracieuses, s’élança avec une prestesse sans brusquerie et s’éleva, comme si les lois de la pesanteur n’étaient pas faites pour elle, jusqu’à la frêle escarpolette et s’établit sur ce piédestal oscillant dans l’attitude d’une déesse sur son autel. La lumière du lustre l’enveloppait comme les rayons d’un Olympe ou d’une apothéose mythologique. Elle se tenait debout, fière et charmante, à cette hauteur vertigineuse, avec l’aisance d’une allégorie habituée à nager dans l’azur des fresques et des coupoles. Sa beauté gagnait à ce plafonnement l’imprévu de lignes et la grâce inattendue qui caractérisent Tripolo ou Goya dans leurs peintures décoratives. Des grappes de cheveux demi-courts, d’un noir luisant,