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L’ORIENT.

tueries humaines, son génie tortionnaire et mercantile tenant d’une main le fouet en lanières d’hippopotame, et de l’autre l’abaque à calculer, se déroule devant vous dans un éblouissement de lumière, comme si les rideaux du passé s’écartaient brusquement tirés par une main puissante, découvrant un théâtre où le décor des siècles a été laissé en place, au lieu de retourner au magasin de l’éternité. Une rumeur immense semble s’élever de ce début tumultueux qui nous fait assister à l’orgie des Mercenaires dans les jardins d’Hamilcar, et les feuillets retombent l’un sur l’autre avec un bruit de cuirasses remuées. Ces Mercenaires à qui Carthage ingrate chicane leur solde sont le plus étonnant ramassis d’aventuriers qui se soit jamais amalgamé sous un drapeau. Ils célèbrent l’anniversaire de la bataille d’Éryx, et, comme le général est absent, la licence soldatesque, libre de discipline, s’en donne à cœur joie.

Il y a là des hommes de toutes nations, et tous les idiomes s’entre-croisent dans le cli-