Page:Gautier - L’Orient, tome 2, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/308

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
298
L’ORIENT.

du Zaïmph ou voile de Tanit, espèce de palladium auquel la superstition populaire croit le sort de la ville attaché. Il laisse donc les soldats regarder de loin l’Acropole s’élevant au centre de Byrsa avec son désordre de monuments, temples à colonnes torses, cônes rayés d’azur, dômes de cuivre, obélisques posés sur la pointe, et cherche à démêler parmi l’entassement des maisons cubiques la place des temples ; Rhamon, aux tuiles d’or ; Melkarth, que couronnent des branches de corail ; Tanit, coiffé de sa coupole d’airain, et les idoles colossales élevant au-dessus des édifices leurs têtes monstrueuses. Le panorama de Carthage l’occupe peu, mais il étudie scrupuleusement l’aqueduc qui fournit les réservoirs de la ville ; et, une belle nuit, deux poignards fixés sous les aisselles, armé d’une corde, terminée par un crampon, il escalade avec Mathô les superpositions d’arches, lève une dalle et pénètre dans le conduit des eaux, suivi du Libyen. Ce voyage aveugle dans le courant noir de l’aqueduc, dont la voûte s’abaisse parfois sur leurs têtes