Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/212

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Tant de choses depuis, par cette pauvre tête,
Ont passé ; dans cette âme et ce cœur de poëte,
Comme dans l’aire des aiglons,
Tant d’œuvres que couva l’aile de ma pensée,
Se débattent heurtant leur coquille brisée,
Avec leurs ongles déjà longs.

Je ne suis plus le même, âme et corps tout diffère,
Hors le nom, rien de moi n’est resté ; mais qu’y faire ?
Marcher en avant, oublier.
On ne peut sur le temps reprendre une minute,
Ni faire remonter un grain après sa chute
Au fond du fatal sablier.

La tête de l’enfant n’est plus dans cette tête,
Maigre, décolorée, ainsi que me l’ont faite
L’étude austère et les soucis.
Vous n’en trouveriez rien sur ce front qui médite
Et dont quelque tourmente intérieure agite
Comme deux serpents les sourcils.