Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/213

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Ma joue était sans plis, toute rose, et ma lèvre
Aux coins toujours arqués, riait ; jamais la fièvre
N’en avait noirci le corail.
Mes yeux, vierges de pleurs, avaient des étincelles
Qu’ils n’ont plus maintenant, et leurs claires prunelles,
Doublaient le ciel dans leur émail.

Mon cœur avait mon âge, il ignorait la vie,
Aucune illusion, amèrement ravie,
Jeune, ne l’avait rendu vieux ;
Il s’épanouissait à toute chose belle,
Et dans cette existence encor pour lui nouvelle,
Le mal était bien, le bien mieux.

Ma poésie, enfant à la grâce ingénue,
Les cheveux dénoués, sans corset, jambe nue,
Un brin de folle avoine en main
Avec son collier fait de perles de rosée,
Sa robe prismatique au soleil irisée,
Allait chantant par le chemin.