Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/222

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Chacun te tire aux dents, belle Italie antique,
Afin de remporter un pan de ta tunique !

» Restons, car au retour on court risque souvent
De ne retrouver plus son vieux père vivant,
Et votre chien vous mord ne sachant plus connaître
Dans l’étranger bruni celui qui fut son maître :
Les cœurs qui vous étaient ouverts se sont fermés,
D’autres en ont la clef, et dans vos mieux aimés,
Il ne reste de vous qu’un vain nom qui s’efface.
Lorsque vous revenez vous n’avez plus de place :
Le monde où vous viviez s’est arrangé sans vous,
Et l’on a divisé votre part entre tous.
Vous êtes comme un mort qu’on croit au cimetière,
Et qui, rompant un soir le linceul et la bière,
Retourne à sa maison croyant trouver encor
Sa femme tout en pleurs et son coffre plein d’or ;
Mais sa femme a déjà comblé la place vide,
Et son or est aux mains d’un héritier avide ;
Ses amis sont changés, en sorte que le mort
Voyant qu’il a mal fait et qu’il est dans son tort,
Ne demandera plus qu’à rentrer sous la terre
Pour dormir sans réveil dans son lit solitaire.