Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/270

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Dans cette sombre nuit plonger avant la tête ?
Quelle langue assez haute et quel cœur assez pur,
Pour chanter dignement tout ce poëme obscur ?
Qui donc écartera l’aile blanche et dorée,
Dont un ange abritait cette amour ignorée ?
Qui nous dira le nom de cette autre Éloa ?
Et quelle âme, ô Jésus, à t’aimer se voua ?

Murs de Jérusalem, vénérables décombres,
Vous qui les avez vus et couverts de vos ombres,
Ô palmiers du Carmel ! ô cèdres du Liban !
Apprenez-nous qui donc il aimait mieux que Jean ?
Si vos troncs vermoulus et si vos tours minées,
Dans leur écho fidèle, ont, depuis tant d’années,
Parmi les souvenirs des choses d’autrefois,
Conservé leur mémoire et le son de leur voix ;
Parlez et dites-nous, ô forêts ! ô ruines !
Tout ce que vous savez de ces amours divines !
Dites quels purs éclairs dans leurs yeux reluisaient,
Et quels soupirs ardents de leurs cœurs s’élançaient !
Et toi, Jourdain, réponds, sous les berceaux de palmes,
Quand la lune trempait ses pieds dans tes eaux calmes,
Et que le ciel semait sa face de plus d’yeux,