Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/62

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Leur vie est comme un bois à la fin de l’automne,
Chaque souffle qui passe arrache à leur couronne
Quelque reste de vert.
Et leurs rêves en pleurs s’en vont fendant les nues,
Silencieux, pareils à des files de grues
Quand approche l’hiver.

Leurs tourments ne sont point redits par le poète ;
Martyrs de la pensée, ils n’ont pas sur leur tête
L’auréole qui luit ;
Par les chemins du monde ils marchent sans cortége,
Et sur le sol glacé tombent comme la neige
Qui descend dans la nuit.

Comme je m’en allais, ruminant ma pensée,
Triste, sans dire mot, sous la voûte glacée,
Par le sentier étroit ;
S’arrêtant tout à coup, ma compagne blafarde
Me dit en étendant sa main frêle : Regarde
Du côté de mon doigt.