Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/85

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J’ai dit aux belles fleurs, doux honneur du parterre,
Au lis majestueux ouvrant son blanc cratère,
À la tulipe d’or,
À la rose de mai que le rossignol aime,
J’ai dit au dahlia, j’ai dit au chrysanthème,
À bien d’autres encor.

Ne croissez pas ici ! cherchez une autre terre,
Frais amours du printemps ; pour ce jardin austère
Votre éclat est trop vif :
Le houx vous blesserait de ses pointes aiguës,
Et vous boiriez dans l’air le poison des ciguës,
L’odeur âcre de l’if.

Ne m’abandonne pas, ô ma mère, ô nature,
Tu dois une jeunesse à toute créature,
À toute âme un amour ;
Je suis jeune et je sens le froid de la vieillesse,
Je ne puis rien aimer. Je veux une jeunesse,
N’eût-elle qu’un seul jour.