Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/177

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une balle au cœur sans doute ; il a l’air de dormir, bien pâle cependant, et pour la première fois, lui qui avait gardé ses riches couleurs, même sous le climat de l’Inde.

Mais Dupleix, violemment, refoule sa douleur. Il ne faut pas que le mouvement de trouble et de désarroi que vient de causer cette mort se prolonge davantage.

— Soldats, dit-il, le malheur qui nous frappe est bien cruel. Mais il faut subir courageusement la triste loi de la guerre. Celui qui nous quitte, riche de gloire, était notre plus précieux auxiliaire, et la place, il est vrai, va rester sans ingénieur. Eh bien, c’est moi-même qui le remplacerai. J’ai par bonheur quelque savoir en mathématiques et j’ai étudié dans ma jeunesse la fortification ; je puis donc me charger de la direction de la défense et je ne faillirai pas à ma tâche. Que les justes larmes que vous arrache la perte de ce héros ne vous fassent pas oublier votre devoir. Songez à vos frères, engagés en ce moment même avec l’ennemi, et qui, par votre retraite, ont sur les bras toute l’armée anglaise. Hâtons-nous de protéger leur rentrée, et que nous n’ayons pas, par notre faute, à déplorer de nouveaux malheurs.

C’est Bussy qui commande la seconde division, et, ne connaissant pas le sort de la première, il a continué à s’avancer.

Le jeune officier est magnifique au feu, plein d’emportement et en même temps de sang-froid, avec un coup d’œil si juste, et une si prompte décision, que ses hommes ont toute confiance en lui.

Il a réussi à s’emparer des huttes, à chasser